Frederick Forsyth, l’auteur des romans Chacal et des Chiens de Guerre, clame haut et fort que le micro-ordinateur de son épouse aurait été hacké –de fort mauvaise manière d’ailleurs- par les services de renseignements américains. Cette injection d’espion logiciel aurait provoqué un plantage généralisé de la machine en question, avec pour conséquence la perte de quelque tapuscrit d’un futur roman ou d’article en souffrance destiné à un média Britannique. Oh, combien de pigistes, combien de journalistes apprécieraient pouvoir invoquer les activités occultes de la NSA lorsque leur Rédac’Chef leur expédie un email comminatoire : « t’es à la bourre, coco, tu dépasses la date de bouclage ! ». Hélas, contrairement à Monsieur Forsyth, il est rare qu’un pigiste passe ses vacances par hasard en Guinée-Bissau en plein milieu d’un coup d’état.
Ce « scoop » estival , dont l’intérêt est digne des lectures de vacances, nous est révélé par Graham Clueley de Sophos. Forsyth, anti-européen activiste, royaliste convaincu – car sujet de Sa Gracieuse Majesté-, partisan d’une droite aussi « décomplexée » que musclée a toujours entretenu autour de sa personne une légende trouble. Une légende qui fleure bon le scandale, l’espionnage, les coups de main des « Affreux » sur ces terres Africaines, là où s’ébattaient les véritables modèles de ses romans, les Bob Denard, les Christian Taverniers et consorts. Les droits d’auteurs du roman « Chiens de guerre » auraient-ils réellement servi à financer un coup de main en Afrique ? Les barbouzes Américaines auraient-elles tenté de fliquer l’ordinateur conjugal ? Tout çà relève très probablement, explique Clueley, du fantasme romanesque et de l’affabulation paranoïaque… ou marketing. Car il faut bien inventer un scandale pour éveiller l’attention des médias. Surtout depuis que les soldats de fortune ne sont plus à la mode. Les supplétifs des Etats interventionnistes ne s’appellent plus « gendarmes Katangais » mais « entreprises de sous-traitance spécialisées dans la sécurité opérationnelle », possèdent sites web et signent des contrats officiels avec les autorités de leurs pays. Quand la guerre devient un service (payant), le romantisme du mercenaire combattant pour un idéal ne rapporte plus un kopeck en droits d’auteurs. C’est probablement d’ailleurs pour cette raison que Madame Forsyth n’a pas pu acheter d’antivirus résistant aux malwares, qu’ils soient d’origine mafieuse ou officiellement codés par des fonctionnaires du DoD.