Ce sont, encore et toujours, les vendeurs de pelles qui bénéficient de la fièvre provoquée par les mines d’or. Sauf peut être lorsque le quincailler se fait voler son stock, rapporte l’agence Associated Press. Entre les mois de décembre et janvier, au fil de trois cambriolages successifs perpétrés en Islande, près de 600 ordinateurs de « minage » de Bitcoins et autres monnaies virtuelles ont été dérobés, pour une valeur totale de plus de 2 millions de dollars. Cette formidable puissance de calcul dédiée, à base d’asics conçus dans l’unique but de calculer des condensats, a peu de chances de se retrouver sur le marché de l’occasion. L’utilisation des machines procurera aux casseurs une discrète rente tant que durera la mode des monnaies virtuelles et tant que les tarifs d’électricité au prix de gros ne seront pas liés à une enquête préalable sur la nature et l’usage de cette énergie consommée.
La part du coût de cette énergie dépensée dans la valeur des cryptomonnaies préoccupe de plus en plus quelques associations d’écologistes et la majorité des médias. Un « mineur personnel », une fois achetée(s) la ou les CPU et réglé la note d’électricité, a de moins en moins de chances d’être rentable, ce qui explique la tendance générale à la collocation des ressources de minage au sein de datacenters, eux-mêmes situés dans des régions où l’électricité n’est pas chère. Au Canada notamment, explique Oilprice.com, là où la politique tarifaire d’Hydro-Québec crée un véritable appel d’air en faveur des nouvelles technologies. A l’origine, ces tarifs préférentiels étaient pratiqués pour attirer des industries fortement énergivores, principalement la production d’aluminium. Or, l’hébergement informatique, quel que soit sa finalité, est un secteur d’activité nettement moins créateur d’emplois que la métallurgie. Plus mobile également… Qu’Hydro-Québec augmente ses tarifs, et ses clients mineurs iront s’expatrier en Chine ou en Inde, pays qui pratiquent également des tarifs attractifs estiment nos confrères Britanniques du magazine Express.
Mais alors, ça consomme combien, un Bitcoin ? le site Digiconomist fournit quelques métriques pas franchement réjouissantes (mais difficiles à vérifier : près de 400 kg de CO2 par transaction, une consommation annuelle de 53 TeraWatt.heure, un coût de fonctionnement de 2,7 milliards de dollars par an, pour une puissance de traitement de 25,5 Peta-Hash.seconde. Histoire d’illustrer cette débauche d’énergie, cela correspond à la consommation des ¾ du continent Africain explique PowerCompare.com qui y va de ses propres statistiques datées de novembre 2017. Plus gourmand que l’Irlande, l’Islande, l’Argentine ou le Danemark, le Bitcoin et ses cousins contribueraient, au même titre que les réseaux sociaux, au réchauffement de la planète, pour le plus grand profit d’une minorité de spéculateurs.
Entre les pessimistes, qui estiment que les monnaies virtuelles consommeront la totalité de l’énergie planétaire d’ici deux ans (comme le confirme le Forum Economique Mondial ) et ceux qui pensent le contraire, il faut savoir aller chercher les vrais morceaux d’enfumage, d’alarmisme ou d’arguments spécieux. Les uns se basent sur une croissance linéaire du phénomène, les autres sur un abaissement brutal de la consommation des processeurs (selon quels arguments techniques ?). D’autres, enfin, tablent sur un tassement de la valeur des cryptomonnaies, phénomène qui « calmerait le jeu ». Mais un tassement incite à ne pas changer de parc informatique (un mineur milieu de gamme coûte entre 6000 et 10 000 USD) et aucun fournisseur d’énergie ne semble vouloir officiellement annoncer une augmentation de ses tarifs. A ceci doit-on remarquer que les seuls experts qui donnent leurs avis sont… des gourous financiers, dont on peut douter des compétences en matière de microélectronique, de thermodynamique… et d’économie, car ce sont en général les mêmes qui n’ont su deviner la crise des subprimes ou les chaînes de Ponzi de l’entreprise Madoff.