C’est avec une maîtrise toute insulaire de l’art de l’understatement que l’ancien patron du MI6 prévoyait, la semaine passée, « des problèmes à long terme pour la sécurité Britannique », problèmes directement liés au départ du Royaume Uni de la Communauté Economique Européenne. Car les opérations de surveillance et de suivi, ainsi que la communication inter services est avant tout une question de flux de données. Et précisément, les règles d’échanges de ces données entre partenaires Européens et services étrangers sont radicalement différentes. En d’autres termes, les services de renseignement d’Outre Manche, souvent accusés de faire en permanence le jeu des agences à trois lettres, demeureraient alliés, mais alliés plus ou moins pestiférés.
Politiquement parlant, le gouvernement de Thérésa May doit marquer cette séparation en diminuant fortement les relations étroites anglo-européennes. Et ce malgré les avertissements du Royal United Services Institute (Rusi). Le « Rusi », au fil d’une note d’information, s’inquiète de cette situation, notamment en matière de lutte contre le terrorisme et le crime organisé. On ne peut demander le divorce et exiger des rapports conjugaux étroits et chaleureux, laisse entendre un article du Register.
Il faudra donc redéfinir les termes du contrat pour les années à venir, tout en sachant que ces termes s’établiront certainement en défaveur de M, de Q et de James Bond. D’autant plus en défaveur que, sur un tout autre chapitre, celui de la capture et de la rétention des données réalisées en vertu du Power Act, la Grande Bretagne n’aurait jamais envisagé de respecter les règlementations Européennes en vigueur … Et les négociateurs côté Européen sauront se souvenir de cette attitude sinon hostile, du moins peu coopérative.
Pourtant, tant d’un point de vue géostratégique (et donc militaire) que sous l’angle du renseignement, il est également impossible à l’U.E. de couper le dialogue avec ce voisin, chez qui l’intelligence est avant tout un service.