Inaugurée dans la journée de mercredi dernier, la plateforme Ordi 2.0 devrait, si l’on en croit les assurances apportées par Eric Besson, faire disparaître la « fracture numérique » d’ici aux années 2012. L’un des moyens mis en œuvre pour que « tous les Français puissent accéder aux réseaux et aux services numériques » passe par la récupération des ordinateurs usagers réformés par les entreprises et les particuliers. Personnes âgées, handicapés, chercheurs d’emploi, étudiants et autres laissés pour compte du monde numérique devraient pouvoir s’acheter, pour des sommes quasi symboliques, un ordinateur révisé et en état de fonctionnement.
Effort louable, certes. Mais politique de croissance « à l’économie » qui risque de provoquer, à terme, de sérieux problèmes de sécurité… ou d’utilisation. Car, depuis quelques temps déjà, les entreprises réduisent considérablement la voilure côté renouvellement de parc… les équipementiers s’en plaignent d’ailleurs fort souvent. La première conséquence de cette situation, c’est un allongement important de la durée de vie des machines en service dans le monde professionnel, machines qui, une fois reversées dans le marché de l’occasion, possèdent au moins 5 à 7 ans de retard technologique par rapport à ce qui s’utilise en général. Inutile d’imaginer un instant voir utiliser les noyaux d’origine… cela fait belle lurette que Windows 98 n’est plus maintenu par son éditeur, et remettre en circulation des machines vulnérables mettrait sans coup férir le Secrétaire d’État chargé de la Prospective, de l’Evaluation des Politiques Publiques et du Développement de l’Economie Numérique, auprès du Premier Ministre sous le coup de la LCEN, pour participation active à l’entretien des botnets.
Bien sûr, il y a Gnu-Linux (et BSD) et ses noyaux allégés. Mais les expériences à long terme laissent entendre que ces parfums sont souvent incompatibles avec des non-informaticiens totalement débutants. Ce qui impliquerait la présence de relais associatifs chargés d’aider les « newbies » en cas de problème, quelque soit le lieu, quelques soient les circonstances. Or, l’énergie que déploient les bénévoles n’est pas une matière inépuisable. Sans relais, avec des moyens limités, il est peu probable que les vœux pieux de ces ordinateurs « 1.0 » maquillés en « 2.0 » puissent se réaliser un jour.