Le Sans a titré « activité DDos intéressante autour de Wikileaks », tandis que Netcraft a affiché l’électroencéphalogramme plat de Visa.com, bien entendu bâillonné par le déluge d’un formidable déni de service provoqué par certains supporters de Julian Assange. Cette attaque porte même un nom : Operation Payback, orchestrée via Twitter (compte désactivé dans la matinée du 9 décembre).
De prime abord, il s’agit là d’un acte condamnable à deux titres. En premier lieu, une attaque en déni de service est un acte de cyber-délinquance caractérisé, une méthode de voyou qui met hors la loi tous ceux qui y participent. D’autre part, les responsables de ces actes semblent ne pas goûter le paradoxe de leurs actes. Car, au nom d’une certaine liberté d’expression et d’un combat militant contre l’occultation d’informations, ces « combattants de la liberté » se rendent à leur tour coupable de censure et d’intolérance. Combien d’entre eux ont entendu parler de Voltaire et de son « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire »* ?
Mais à bien y regarder, l’homme sécurité –et cartésien- qui sommeille en chacun de nous se demandera qui, chez Visa, chez Amazon, Mastercard, Paypal ou Postfinance, est en charge d’une réelle politique de sécurité et de l’impact sur l’image de marque, et pourquoi cette personne n’est pas intervenue (ou pour quelle raison son avis n’a pas été retenu) lorsque lesdits organismes ont décidé de prendre leurs mesures « anti-wikileaks ». Car prendre la décision unilatérale de bloquer un compte en banque, une filière de transfert d’argent ou l’hébergement d’un site manifestement militant, c’est s’exposer de facto à ce genre de riposte aussi irréfléchie. Wikileaks possède un atout de taille : son pouvoir de victimisation. Tout acte intenté contre l’institution ou l’un de ses membres sera interprété et médiatisé comme une persécution. Un pouvoir qui est interdit aux banquiers, aux hébergeurs, aux industriels. Qui donc, sans pouffer de rire, serait capable de répéter trois fois de suite « pauvre petit Visa » en caressant l’un de ses Pédégé dans le sens du cigare ?
Le fait serait nouveau que l’erreur serait pardonnable ; mais les précédents, tant politiques qu’hacktivistes, sont trop nombreux pour que ce soit une nouveauté. Visa est tombé sous les coups de ses propres erreurs de jugement. La violence est un apanage d’Etat, qui légitimise ses actes en raison d’une morale, d’une politique ou de sa force. Une entreprise n’a ni la puissance, ni la légitimité d’un Etat, et ne peut donc rendre justice elle-même. Le ferait-elle qu’elle accepterait que la partie adverse agisse de même. Et si les principaux tenants du parti « anti-wikileaks » ont agi dans les limites du droit de leur pays, ils ont commis une énorme erreur politique, celle de ne pas se protéger, se « couvrir » derrière les instances supérieures d’une nation. Elles ont surtout commis l’erreur de tenter de résoudre un problème politique avec une réponse technique.
NdlC Note de la correctrice : phrase totalement apocryphe, mais qui résume dans les grandes lignes une partie de la pensée du patriarche de Ferney, par ailleurs partisan de l’esclavage et défenseur acharné de la pensée gnostique.