Selon nos confrères de Bleeping Computer, la Douma serait sur le point de faire passer un oukase déclarant hors la loi Tor, les VPN et les proxys. Ce seront les FAI Russes qui seront chargés d’appliquer ce filtrage. Et nos confrères de faire remarquer que ce sera le seul pays au monde qui appliquerait ce triple bannissement.
Tout, dans le calendrier des événements, laisse à penser que cette loi vise avant tout les citoyens, dans le but de contrôler la consultation de sites interdits. C’est là une vieille tradition folklorique locale qui consiste à poursuive toute personne cherchant la Pravda dans les Izvestia, un fond de vérité dans le déluge des informations numériques.
Cette loi sera-t-elle signée par le Président Poutine, et si oui sera-t-elle appliquée ? La chose est peu probable, à court ou à long terme. La Russie, et son meilleur ennemi l’Ukraine, sont deux pays « exportateurs » de services VPN, de serveurs « .onion », de proxy dynamiques. Sans eux, pas ou peu de serveurs « bullet proof », de réseaux aussi mafieux que prospères, de services dits « dark web ». Si la loi inquiète les particuliers, elle a peu de chance de se voir respecter par les réseaux mafieux (l’économie des deux pays pouvant s’en ressortir). D’autant que le cas échéant, ces derniers peuvent servir de supplétifs aux forces militaires numériques. Voilà pour le court terme.
A plus longue échéance, l’interdiction de protection assurée par les VPN et les proxys provoquerait une véritable déflagration dans le monde des affaires. Plus de liaisons distantes pour les entreprises, moins de services d’équilibrage de charge, aucune confidentialité dans les échanges liés aux marchés publics, pas le moindre espoir d’évolutions vers une société numérique dotée de services administratifs performants (et Lénine seul sait à quel point est lourde et tentaculaire l’administration Russe), plus de Cloud, disparition des services Wifi publics, évaporation de l’ensemble des transactions bancaires, qu’elles soient émises par des particuliers ou utilisées en B2B… et l’on imagine mal les conséquences en matière de commerce international. Certes, l’aigle à deux têtes a toujours su ménager des exceptions dans l’application des lois, particulièrement dès qu’il s’agit de décisions concernant les rouages de l’Etat, de l’Armée, des Finances, de la Justice ou des services de renseignements. Mais en matière de technologies, il est bien difficile d’imaginer autoriser un protocole pour un type d’usage et l’interdire pour un autre. Particulièrement si ledit protocole est chiffré. En Russie comme en France, il se trouvera toujours un député pour envisager un « chiffrement faillible » ou un « interdit sur les vpn ». Et il y aura toujours un exécutif assez visionnaire pour bloquer ce genre de proposition mortifère.
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