Ils sont toujours passionnants, les billets de Neal Krawetz traitant de la désinformation par l’image. De l’affaire des missiles Iraniens qui se multiplient au décollage sous l’effet de la propagande, en passant par les images idylliques du paradis écologique Chinois ou les trahisons techniques du format Jpeg par rapport à PNG… Mais il faut avouer que cette fois-ci, Krawetz a fait preuve d’une abnégation sans borne, d’un stoïcisme admirable en se plongeant, probablement des heures durant, sur la plastique des cuisses et du nombril des mannequins de Victoria’s Secret. Car, nous apprend-il, le « shopping » (entendons par là le « traficotage d’images par PhotoShop ») touche également les catalogues de lingerie. Les modèles les plus pulpeux de la section « nuisette et dessous chics » sont parfois aussi retouchés que les sous-secrétaires disgraciés du Kominterm durant les périodes les plus noires de la stalinisation. Et Krawetz donc de nous expliquer comment les mollets moulés et le mignon minois d’une langoureuse Lolita sont littéralement « reconstruits », repeints et repensés sous prétexte qu’une ombre vient assombrir un giron, qu’une côte légèrement saillante montre qu’un 36 est souvent le signe révélateur d’une anorexie commandée, et que l’éclat d’un bikini ne doit pas grand-chose à la couleur « garantie grand teint » d’un fabricant de tissus. La leçon de ce travail technique sur le pixel et la densitométrie numérique ? « Il n’y a pas de « beauté ana » » dit en substance Neil Krawetz. « Les super-mannequins que l’on voit sur les images des magazines ne sont pas tels qu’on les représente. Mesdemoiselles, plutôt que de détruire votre santé à tenter d’imiter ce rêve, achetez-vous plutôt une version de Photoshop ».